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4.04 - Everybody hates Veronica

 Date : 23 Novembre 2007

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L'incident du paint ball prend de l'ampleur et les ennuis semblent s'accentuer pour Veronica. L'occasion pour Weevil d'enfiler le costume d'enquêteur et de partir sur des voies jusqu'alors inexplorées.
Les masques risquent de tomber et les vrais amis de se révéler.

Ecrit par Bzzbzz 

Note de l'équipe: dans cet épisode, vous trouverez les dialogues en italique et les voix-off en gras.

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Bonne lecture!



Right Here, Right Now de Fat Boy Slim


Le son venait brutalement de se couper. Plus un seul bruit ne parvenait à ses oreilles. Autour, tout se mouvait au ralenti. Les gens ne couraient plus mais se déplaçaient en effectuant moins d’un mouvement à la seconde. Les couleurs avaient soudainement disparu et le monde s’était couvert d’un gris. Immobile, son lanceur pendant le long de son corps comme un membre mort, Veronica assistait à cet événement comme un spectateur devant un film en noir et blanc.
Un groupement de personnes s’était formé à quelques mètres d’elle mais elle restait incapable de bouger. Des gyrophares ne tardèrent pas à se refléter sur les feuilles des arbres et les installations du parc. Une ambulance traversa alors la foule et tenta de disperser les gens. Mais la curiosité était bien trop forte pour les badauds. Un brancard fut aussitôt déplié sur le sol puis on entendit une voix forte et masculine s’élever :
- Reculez-vous, s’il vous plaît ! Faites un peu d’air.

Le cercle qui s’était naturellement formé s’élargit un peu sous les injonctions des ambulanciers qui purent enfin faire leur travail.
En quelques minutes à peine, ils pansèrent et emmenèrent le blessé dans le camion  avant de partir en vitesse pour les urgences les plus proches.

Immédiatement après le départ du véhicule, une silhouette poussa la foule sans ménagement pour en sortir et se dirigea vers Veronica d’un pas lourd et pressé. Les poings serrés.
Sans réellement prendre conscience de la situation actuelle, la jeune fille comprit malgré tout que quelque chose allait mal.

- Qu’est-ce qui ne va pas chez toi ???

Les yeux de Veronica s’étaient posés sur le visage rouge et dur de Dick qui lui en voulait, semble-t-il, beaucoup. Enervé par son immobilisme, il la poussa un peu pour la faire réagir. Mais rien à faire, elle le fixait toujours avec de grands yeux, les bras ballants.
Son manque de réaction n’était pourtant pas volontaire, tout son corps s’était contracté en une fraction de seconde lorsqu’un bruit sec avait raisonné dans les environs. Ses tympans s’en souvenaient encore.

- C’est plus fort que toi, c’est ça ! continua Dick. Dès qu’un homme s’approche de toi, il faut que tu le blesses !

A ce dernier mot, elle cligna des yeux. Une fois. Prenait-elle enfin conscience de son cas ?

- D’abord Aaron Echolls et ton père qui passent à deux doigts de la mort par ta faute. Puis Beaver qui saute devant tes yeux sans que tu ne lèves le petit doigt !

Dick criait désormais. Il ne parvenait plus à contrôler sa colère.

- Et maintenant Logan !! C’est toi qui devrais être à sa place. Ca fait des années que tu nous pourris l’existence ! Aujourd’hui, c’était la fois de trop ! la menaça-t-il en pointant son index vers son nez. Je te promets que tu ne t’en sortiras pas comme ça, Mars !

A la recherche de son amie, Mac s’était éloignée de l’attroupement. Elle avait rapidement réalisé que seules deux personnes étaient restées isolées et qu’il s’agissait de Dick et Veronica. S'apercevant que la tension qui émanait d'eux était encore plus forte que celle dégagée par cinquante personnes, elle attrapa le bras de Wallace au passage et accéléra le pas.  
Ils étaient arrivés à temps pour assister au laïus de Dick. Constatant que Veronica ne bougeait pas sous le poids des accusations et réprimandes, Mac posa sa main sur l'épaule de Dick afin de le détourner de son centre d’intérêt.

- Tu confonds tout, Dick, lui dit-elle calmement.  

- Ne t’en mêle pas,
s’emporta-t-il en se dégageant de son emprise.

Il se détourna alors d’elles et prit sa tête entre ses mains. Il sentait que les larmes allaient prendre le dessus et il ne tenait pas à le montrer.
Voyant que Veronica ne bougerait pas, Mac avait pris le parti de calmer Dick. Elle craignait qu’il ne pète un plomb dans les minutes à venir. Elle s’approcha alors doucement de lui tout en restant à quelques pas, par simple précaution.

- Je sais que tu t’inquiètes et que Logan est ton meilleur ami…

- Il est comme mon frère désormais, Mac !
la coupa-t-il les yeux rouges. Quand ma famille a volé en éclat pour la deuxième fois et qu’elle a pris fin sur le parvis du Neptune Grand Hotel, j’ai dû m’en reconstruire une. Mais encore une fois, Veronica a tout écrasé sur son passage.

Mac le regarda, impuissante. Que dire en effet face à de tels aveux ? En finissant sa phrase il avait à nouveau baissé la tête, puis il shoota dans un caillou qu’il envoya valser à plusieurs mètres.
Spontanément, devant cet être habituellement dépourvu de conscience, Mac tendit le bras en direction de son cou et l’attira à elle. Il se laissa alors consoler par cette amie qu’il découvrait petit à petit.

Pendant ce temps, quatre mètres derrière, le rythme cardiaque de Veronica avait considérablement augmenté.

- Est-ce que ça va ? demanda Wallace, inquiet de son inaction.

Plongée dans son mutisme, Veronica ne parvenait qu’à orienter son regard et à ce moment-là, elle l'avait dirigé vers le sol terreux. Elle tentait ainsi tant bien que mal de calmer sa respiration.

- Veronica ! l’interpella-t-il plus vivement. Tu réalises ?

Peine perdue.

- Mais enfin fais quelque chose !! s’emporta-t-il finalement. Tu viens de tirer sur un homme, Veronica.  Un homme !! Est-ce que ce ne serait pas le moment idéal pour sortir de ta forteresse ?

Ne provoquant encore une fois aucune réaction chez son amie qui gardait invariablement la tête basse, Wallace lâcha son fusil par terre en secouant la tête de désolation.

- Je n’aurais jamais dû participer à ce jeu idiot.

Après un dernier regard, il tourna les talons et quitta rapidement le terrain. Il regrettait amèrement de s’être laissé convaincre de participer à cette mini réplique de ce qu’il avait cherché à combattre en Afrique.
Lorsqu’il eut tourné le dos, Veronica releva péniblement la tête et sentit une larme couler sur son visage pâle.

Toute sirène dehors et soulevant un épais nuage gris, la voiture des autorités arriva sur les lieux avec pertes et fracas. Le shérif et son adjoint Sacks sortirent du véhicule et furent rejoints par l'organisateur du triste week-end.
En observant Kenny parler avec les hommes en uniformes, Veronica reprit peu à peu possession de ses pieds. Elle ressentit de désagréables picotements sous la voûte plantaire.
La main sur l'arme accrochée à leur ceinturon, les représentants de la loi ne tardèrent pas à s'avancer vers elle, guidés par le doigt inquisiteur de Kenny.
Elle baissa alors doucement les yeux sur son bras droit et commença à comprendre. Sa respiration se coupa aussitôt et sa main lâcha prise. Le lanceur tomba, dans un amas de poussière, et rebondit lourdement sur le sol. Le bruit de sa chute résonna aux oreilles de la jeune fille.
Un goût acre lui parvint aussitôt en bouche. Le goût du malaise et du danger. Puis, comme en réaction à ce phénomène, son estomac se tordit violemment. Elle se sentait vraiment mal désormais. L'anesthésie ne faisait plus effet.

- C'est gentil de m'éviter un tir de sommation, Mars, lança Vinnie Van Lowe à quelques mètres d'elle lorsqu'elle lâcha son arme. On devient raisonnable.

La vitesse à laquelle elle respirait n'inspirait pas vraiment confiance aux policiers. Le regard rivé sur eux, elle semblait prête à commettre une folie. Vinnie cessa donc l'ironie. Il ne tenait pas à l'énerver plus que nécessaire. Il avait un dîner important avec le maire le soir même!

- Je vais m'approcher, Veronica. Reste calme et tout se passera bien.

Comme si des sanglots traversaient l'intégralité de son corps, le ventre de Veronica subissait de forts tremblements.

Vinnie fit un pas en avant, puis un autre. Toujours très lentement, la main prête à dégainer au cas où elle changerait d'avis. Soudain V fit rapidement quelques pas jusqu'à la structure de paint-ball la plus proche, s'y appuya, ferma les yeux et se plia en deux, la tête en avant. Son corps fut alors parcouru de nombreux soubresauts. Et les spasmes ne cessèrent que lorsque son estomac fut complètement vide.  

Dégoûté, Vinnie, qui avait sursauté avant de s'arrêter, leva les yeux au ciel et grimaça tandis que Sacks s'approchait de Veronica en lui tendant un mouchoir.

- Merci,
répondit-elle très faiblement en attrapant le mouchoir, la main tremblante.

- Sacks, arrête les violons, et passe-lui les menottes!
râla Van Lowe On n'a pas que ça à faire!

Une fois la surprise passée, il avait aussitôt repris toute son assurance. On ne faisait pas tressaillir le shérif sans un retour de bâton.

Where is My mind – Pixies

L'agent s'exécuta après s'être excusé auprès de la jeune fille d'un hochement de tête. Avec attention, il lui passa les deux bracelets argentés au poignet. Les yeux pleins de larmes après de telles convulsions, Veronica se laissa mollement faire et avança après que Sacks l'y eût invitée.
Le shérif et son adjoint de chaque côté, elle traversa alors la foule d'étudiants restés à observer. Ceux qui étaient censés être ses camarades prirent vite parti et montrèrent bruyamment leur écoeurement, la dévisageant avec mépris et consternation. La tête basse, Veronica se dirigea jusqu'à la voiture, poussée par Van Lowe. Tandis que ce dernier ouvrait la portière, Sacks plaça sa main sur la tête de l'interpellée pour qu'elle ne se cogne pas en entrant dans le véhicule. Lorsque la portière claqua, les bruits se turent. Enfin…


Le bruit du verrou claqua dans son dos. Ce n’était pas la première fois qu’elle était jetée en prison mais cette fois-ci… c’était bel et bien différent.
Les bruits de pas de Van Lowe s’éloignèrent bruyamment et, une poignée de secondes plus tard, une porte se ferma.

Quelle chance, une cellule pour moi toute seule…Lamb ne m’avait encore jamais fait ce plaisir.

Après avoir parcouru la pièce d’un rapide regard, Veronica fit quelques pas pour aller s’asseoir sur ce qui devrait lui servir de lit et prit sa tête entre ses mains. L’heure n’était pas à la plaisanterie.


Environ trois heures étaient passées et rien ni personne n'était venu l'inquiéter. Sans doute Vinnie était-il trop occupé à répandre l'information concernant l'arrestation du nouveau détective de la ville. A moins qu'il s'agisse d'une tactique d'intimidation.
Tous ses effets personnels lui avaient été retirés. Evidemment dépossédée de sa montre, elle avait dû se référer au tic tac de l'horloge clouée au fond du couloir. L'estimation était donc très approximative. Mais le temps lui avait paru extrêmement long. Comme une traversée du désert.
Pourquoi diable était-elle là d'ailleurs?
Après s'être baissée, Veronica se dirigea vers les barreaux de la cellule sur lesquels elle cogna à répétition et sans cesse son verre métallique. Un vacarme de tous les saints retentit alors dans le bâtiment.
La main soutenant son menton, le coude appuyé sur le barreau horizontal, elle activait son poignet comme si elle tenait une crécelle.

Apportez-moi un haillon et j'aurai vraiment l'impression d'être une pestiférée.

  On mit bien une dizaine de minutes avant de venir voir ce qu'il se passait. Un nouvel adjoint du shérif s'avança vers elle. Vinnie n'avait pas perdu de temps pour récréer son bureau. Pamela, dans la cellule d'en face, s'époumonait en vain pour faire cesser le bruit.

- Christ! jura la femme à la minijupe imprimée léopard. Tu vas la fermer un peu?!

Malgré la grossierté de sa voisine, Veronica avait persisté. Il fallait avouer que les jurons canadiens avaient toujours eu le don de l'amuser.

- Qu'est-ce qu'il se passe là-dedans? avait demandé l'homme en uniforme en lui retirant des mains l'objet du tapage.

Pamela soupira bruyamment et fit claquer ses talons aiguilles sur le béton en retrouvant son lit.  

- J'ai beau retourner la question dans tous les sens, commença Veronica sur le ton de la confidence, je ne comprends toujours pas ce que je fais là.

L'adjoint au shérif baissa la tête à son niveau et répliqua sur le même ton:

- C'est généralement là qu'on atterrit lorsqu'on tire sur quelqu'un.

Elle eut un mouvement de recul et fronça les sourcils.

- Tirer sur quelqu'un, c'est justement le but du paint-ball!

- Sauf que dans le cas présent un homme est gravement blessé…

- Mais ce n'était pas volontaire! Je me demande d'ailleurs comment une balle de peinture a seulement pu provoquer une blessure.

- Il se passe des choses bizarres parfois, ironisa l'agent. La peinture a dû miraculeusement se transformer.


"gravement blessé"? Ai-je bien entendu?
Quelque chose me dit que les ennuis n'ont pas encore vraiment commencé


- J'emmène ça avec moi, signala-t-il en montrant le verre alors qu'il reprenait le chemin des bureaux.

En le regardant s'éloigner, Veronica laissa doucement retomber sa tête contre les barreaux de la cellule. Cette histoire ne sentait pas bon du tout, et ça ne venait assurément pas des toilettes qui se trouvaient derrière elle.

- Selon les lois de ce pays, j'ai le droit à un appel, lança-t-elle calmement et sans bouger.

Le représentant des forces de l'ordre s'arrêta au milieu des marches d'escalier et tourna la tête dans sa direction. Veronica pencha un peu la tête sur le coté et haussa les épaules.
L'homme attrapa alors son trousseau de clés attaché à sa hanche et redescendit les quelques marches.


Assise dans une salle d’interrogatoire, Veronica dicta le numéro de son choix à l’agent qui lui tendit ensuite le combiné après avoir vérifié la tonalité.
Sous le regard imperturbable de son surveillant, elle détourna la tête lorsque son interlocuteur décrocha enfin.

- Salut papa, dit-elle comme une enfant prise en faute. Tu ne devineras jamais où je me trouve…


   Sur le campus, les voitures arrivaient en masse. La fin des festivités ayant été précipitée, les campeurs avaient dû plier bagages plus tôt avant de reprendre la route en sens inverse. Les commentaires –principalement adressés à mademoiselle Mars- ne manquaient pas, si bien que Weevil fut au courant de l’aventure avant même qu’on ne la lui raconte.
Aussi, lorsqu’il aperçut le BFF de l’actrice principale se diriger vers la cafétéria, il ne perdit pas une minute.

- Yo, Wallace ! lança-t-il en abattant sa main gauche sur l’épaule du jeune homme. J’ai entendu dire que le week-end s’était transformé en Règlement de Comptes à O.K. Choral. Ca a tourné au vinaigre ?

- Veronica a pété les plombs, expliqua Wallace en secouant la tête, accompagné de gestes nerveux. Logan est à l’hôpital. Je ne sais pas ce qu’il se passe ici mais depuis la rentrée c’est le grand n’importe quoi !

Weevil l’arrêta un instant et reprit pour bien comprendre :

- Tu veux dire que les rumeurs sont vraies.

- Si les rumeurs disent qu’une blonde furibonde a tiré sur un adversaire, l’envoyant alors à l’hôpital, et qu’elle est repartie les menottes aux poignets, alors tout est vrai.

- Attends, attends ! s’impatienta Weevil en prenant sa tête entre ses mains. Elle est au poste en ce moment ?

- Où veux-tu qu’elle soit ? Elle a tiré sur quelqu’un, Weevil !
insista Wallace encore une fois.

- Non !  l’arrêta Eli en levant une main. La question est : « Où devrais-TU être en ce moment? ». Tu es son meilleur ami, Wallace. Même si elle n’en avait pas l’air, elle a toujours été là pour toi ! Et tu comptes la laisser tomber maintenant ? La juger ?  Yo, mec ! C’est vraiment pas ce que j’appelle être un bon ami…

Un silence s’abattit froidement sur les environs. Les gens qui passaient à proximité avaient sans doute entendu le latino hausser la voix. Après avoir adressé à Wallace ce regard moralisateur dont il avait le secret, Weevil fit demi-tour et regagna le bâtiment principal. Le regard las, l’étudiant fourra ses mains dans ses poches et le regarda partir.

***


Clic clic… clic clic….
Veronica ouvrit un œil, intriguée par le cliquetis qui parvenait sourdement à ses oreilles. Elle s’était visiblement assoupie malgré l’inconfort du matelas de la cage qui lui servait de suite.

- Et Blanche-Neige se réveilla…

Un peu désorientée, elle se redressa doucement et posa ses deux pieds au sol avant de porter une main à sa tempe droite. Elle ferma les yeux un court instant pour tenter de faire passer la douleur vive qui lui martelait le cerveau mais en vain.  

- …bizarrement, le Prince Charmant ne semble pas avoir le beau rôle dans ce conte moderne, persista l’homme de l’autre coté des barreaux.

Veronica cligna des yeux et reconnut enfin la personne qui lui parlait. Tout ceci n’était donc pas un rêve.
Légèrement en biais par rapport aux barreaux, Vinnie était assis sur une chaise, son pied droit ramené sur son genou gauche. Dans sa main droite qui reposait sur le fer froid, une longue clé oscillait encore. C’était sans nul doute de là qu’était venu le bruit.
Depuis combien de temps était-il là ?

- La pomme était-elle avariée? continua-t-il, un sourire sarcastique sur les lèvres.  

Le shérif se leva et déverrouilla la grille.

- J'ai quelques questions à te poser. Tu connais le chemin, dit-il en lui laissant le passage libre.


Installée depuis une dizaine de minutes dans l'unique salle d'interrogatoire aux vitres teintées, Veronica avait l'impression de perdre son temps. Vinnie l'avait laissée entrer et s'installer avant de prétexter un coup de fil urgent. Depuis, elle avait la sensation qu'une dizaine de regards étaient braqués sur elle en permanence.
 Lorsque le shérif fit à nouveau son entrée, une vieille odeur de cigarette pénétra aussitôt dans la pièce. L'attitude de Vinnie laissait à la jeune fille une impression de déjà vu. Comme un goût de nostalgie. Peut-être était-ce dû à cette migraine, mais les couleurs n'étaient plus aussi claires qu'avant. Un voile brumeux passa soudainement devant ses yeux et elle crut alors voir James Stewart*. Vêtu d'un pantalon de costume gris, d'une chemise blanche et de bretelles, Vinnie s'installa confortablement. Ses deux pieds croisés sur la table, il sortit une cigarette de sa poche de chemise et l'alluma en prenant son temps.
Veronica pouvait presque voir la pellicule du film défiler sur les bords de l'image en noir et blanc. Elle coiffa mentalement le shérif d'un Borsalino, posé suffisamment de travers pour lui assurer un regard mystérieux, ses cheveux gominés et peignés sur le côté.
Veronica déglutit avec peine. Elle se trouvait dans un monde parallèle.

- C'est un grand jour pour moi, Veronica, lui assura Vinnie en rejetant un nuage de fumée.

- Pour que tu sortes les bretelles, je n'en doute pas! Tu aurais pu mettre une cravate. James et Montgomery la portaient tout le temps eux… Cependant, tout le monde n'a pas leur classe, termina-t-elle moins fort.

- Je vois que tu reprends tes esprits. On va donc pouvoir commencer à jouer!

- Oh! se redressa-t-elle avant de regarder dans tous les coins de la salle. C'est un jeu? Je n'avais pas vu les caméras. Où est le buzzer? Je suis très douée en vocabulaire. Vas-y, donne-moi une définition!

- Si tu insistes. Terme juridique définissant un commencement d’exécution qui n’a été suspendu qu’en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur. Je suis? Je suis?

Veronica appuya sur le buzzer imaginaire en imitant un bruit nasillard puis claironna.

- Une tentative de meurtre!

- Bien Mademoiselle Mars. Tu viens de découvrir le principal chef de ton inculpation! Je savais que tu pourrais être aussi douée que ton père. Dommage qu'il ne pratique plus…

Le visage de Veronica s'obscurcit soudain. L'idée que son père ait dû renoncer au poste de shérif et à ses capacités de détective privé par sa faute lui était difficilement supportable. Et que Vinnie Van Lowe s'en serve contre elle l'agaçait encore plus.

- Je récapitule donc. Détective privée, appartenant à la famille Mars, accusée de tentative de meurtre… C'est une grosse affaire ou je n'y connais rien! s'extasia le shérif. Rien de comparable avec cette sombre histoire de traite des Noires que tu m'avais servie comme du caviar sur un toast. Cette fois, c'est le JT assuré! Peut-être même qu'Oprah…

Il n'en fallait pas plus à la jeune fille pour changer de ton. Lui rappeler à quel point elle s'était faite avoir n'était pas pour la rendre plus docile.  

- Si on en venait aux faits, shérif!

Vinnie retira ses chaussures vernies de la table pour y poser ses avant-bras.  Le visage proche de celui de Veronica, il sourit.


- Les faits sont clairs. Ca ne va pas être joli joli…


Il se leva enfin rapidement et quitta la pièce en claquant bruyamment la porte.
Veronica soupira après avoir levé les mains au ciel.

Mais à quoi joue-t-il exactement? Ca va faire des heures que je suis là tandis que Dumber s'amuse à tester les techniques d'intimidation piquées à Jack Malone.


- Est-ce qu'on pourrait m'envoyer quelqu'un de sérieux? cria-t-elle pour que sa voix traverse les vitres sans teint.

Le menton dans sa main gauche, Veronica fixait le carrelage fissuré en tapotant ses doigts sur la table en fer. Une grimace s'était naturellement formée sur son visage, traduisant ainsi son ennui mortel. Le message était clair. Vinnie voulait la faire tourner en bourrique. Enfin c'était en tous cas ce qu'il lui semblait, car elle était toujours incapable de regrouper clairement ses idées. Seuls les nerfs et l'instinct avaient guidé jusqu'alors son attitude, un brouillard opaque enveloppant toujours ses pensées.
Une tasse de café fumant à la main, le shérif entra à nouveau dans la pièce. Peu impressionnée, Veronica leva doucement un regard de Droopy sur lui et patienta. Il fit le tour de la table, très lentement.

- Ce n'est apparemment vraiment pas ton jour, finit-il par dire en fronçant les sourcils.

Je n'ose pas imaginer le nombre d'heures qu'il a dû passer devant sa télé à travailler ses expressions du visage.

- On sait que l'atmosphère était plutôt tendue durant le week-end entre Logan Echolls et toi. Ce qui nous laisse facilement penser que ton acte était délibéré et même prémédité. Il va t'être difficile de le nier maintenant.

- Que mon acte était quoi? s'étouffa-t-elle.

Veronica comprit alors que la situation était bien plus grave qu'elle ne le pensait. Au loin, à travers le brouillard qui emplissait sa tête, elle le vit apparaître. Le gyrophare. Vague tache bleue au départ, il se rapprochait peu à peu, balayant le brouillard à chaque mètre parcouru. Le bruit... Le bruit apparut. Les sirènes qui hurlaient, les gens qui criaient, Wallace qui lui parlait... Le gyrophare continuait à avancer, transperçant avec violence l'engourdissement de ses pensées... Que disait Wallace? "Tu viens de tirer sur un homme Veronica"? Un homme? Quel homme?
Et le brouillard se leva.
Elle se revit tirant sur Logan, et celui-ci qui s'écroulait. Elle revit le rouge qui n'était pas celui de la peinture... Logan... Le rouge... Du sang!

- Comment va Logan? demanda-t-elle enfin, inquiète.

- Mal, se contenta de répondre Vinnie pour ne pas perdre son objectif de vue. Mais à ta place, je me préoccuperais plus de mon propre cas.

Il s'arrêta et la regarda.

- Oh mais attends! réalisa-t-il en écarquillant de grands yeux. Je ne suis pas à ta place c'est vrai!

Après avoir ri de sa blague, il tira la chaise à lui pour s'y asseoir.

- Il va falloir qu'on cause sérieusement maintenant, Veronica.

- Je n'attends que ça!

- Voilà comment je vois les choses. Après avoir essayé de cacher ton agacement envers ton ex petit ami, lorsque tu as appris qu'il avait une liaison avec une camarade de classe, tu es devenue rouge de colère. Durant la compétition, le ton est monté. Puis, arrivé le moment fatidique de l'épreuve de paint-ball, tu y as vu le moyen idéal de te venger. Il t'a suffi de changer le projectile de ton lanceur et de viser lorsqu'il était enfin dans ta ligne de mire. Il n'y a cependant qu'une chose qui me dérange. Je pensais que tu viserais mieux!

Changer le projectile? Si seulement je comprenais de quoi tu parles…


- Maintenant ça suffit! s'emporta Veronica. Je veux qu'on me dise clairement ce qu'il se passe et de quoi je suis accusée. Je ne comprends pas un traître mot de ce qu'on me reproche.

- Ton "ami" Logan est en ce moment même à l'hôpital et s'apprête à passer sur le billard. Aux dernières nouvelles, la balle que tu as tirée s'est logée sous sa clavicule et semble se déplacer.  Elle pourrait atteindre le cœur. Et le fait que la balle en question ne corresponde pas aux munitions d'un lanceur normal nous fait dire que ce n'est pas un simple accident.

- Qu'est-ce que vous avez retrouvé au juste? demanda Veronica intriguée.

- Une balle tout ce qu'il y a de plus réelle. De la chevrotine.

- Ce n'est pas logique.

- Les crimes passionnels le sont rarement!

- Mais enfin Vinnie, j'étais sur le terrain, entourée d'une cinquantaine de personnes. Comment aurais-je pu changer les balles de mon fusil?


- A toi de me le dire…

- Eh bien je te le dis. Je ne l'ai pas fait!
s'emporta-t-elle face à l'obstination du shérif.

- Un témoin nous a rapporté les mots doux que tu avais proférés à l'encontre de la victime. Excuse-moi donc si j'ai du mal à te croire sur parole.

- Qui?


- Voyons Veronica! Tu sais bien que je ne peux pas révéler ce genre d'informations.

Van Lowe sourit et s'apprêta à quitter la pièce encore une fois.
Devant la porte, il se retourna:

- Au fait, l'Université de Hearst porte plainte contre toi. Tu sais au moins pourquoi il y a enquête…

Il partit alors et laissa Veronica abasourdie par tant d'informations déconcertantes.

***


- Ca commence à devenir une habitude!

Veronica releva vivement la tête et émit un faible sourire reconnaissant lorsqu'elle reconnut Cliff. L'avocat venait d'entrer avec sa mallette et s'assit en face de la jeune fille.
Veronica soupira de soulagement. Elle était sur le point de devenir folle avec les allers-retours du shérif et tous ces points en suspension. Les traits de son visage étaient tirés mais on l'aurait été à moins après avoir passé des heures dans le doute.

- L'homme qui tombe à pic… murmura-t-elle en essayant de masquer sa détresse.

- Comme tu le sais, ton père est absent pour le week-end. Il m'a donc prévenu. C'a l'air plus grave cette fois,
lui confia-t-il en retour.

- C'est une histoire de fou.

Cliff ouvrit son porte-document et en sortit une chemise cartonnée. Il feuilleta quelques papiers.

- blablabla…paint ball…tentative d'homicide …Logan Echolls. Ce que j'aime chez toi, Veronica, ironisa le juriste, c'est que tu ne t'en prends jamais aux gens puissants de cette ville.

- Je sais que les faits sont contre moi mais je ne suis pas responsable de ce qu'il s'est passé. Je ne comprends même pas qu'on puisse me soupçonner d'avoir voulu tirer volontairement sur quelqu'un. Même s'il s'agit de Logan Echolls!

Elle lui expliqua alors en détail les événements passés au cours de ce week-end d'intégration.


  La porte s'ouvrit sèchement et Vinnie Van Lowe pénétra dans la salle d'interrogatoire dans son habit de lumière.
Veronica leva les yeux au ciel. Son cinéma commençait à la fatiguer.

- Le temps de préparation qui vous était imparti est terminé. On rend les copies!
Cliff se leva et fit glisser sa chaise de l'autre coté de la table pour s'asseoir à gauche de Veronica.

- Alors! lança Vinnie en se frottant les mains, un large sourire aux lèvres. Qu'est-ce qu'on négocie?

- La sortie de ma cliente innocente, pour commencer. Les excuses viendront plus tard, je n'en doute pas.

Le shérif rit franchement.

- Les faits sont clairs. L'arme qu'on avait attribuée à Veronica Mars s'est enrayée pendant le match opposant Monsieur Echolls à Mademoiselle Mars et Monsieur Barby, organisateur de l'événement. La balle qui a blessé Mr Echolls provient simplement du lanceur qu'on lui a donné en remplacement

- Dans lequel elle a eu tout le temps d'interchanger les balles! le coupa le shérif.

- Absolument pas, continua Cliff. Ma cliente n'est en aucun cas sortie du terrain de jeu pendant la partie. C'est depuis le banc de touche que Mademoiselle Maria Lopez, blessée à la cheville un peu plus tôt, a fait l'échange des lanceurs. Par conséquent, si changement de balles il y a eu, il a forcément dû se faire avant que le lanceur de Veronica ne s'enraille. Rappelons au passage, que près de cinquante personnes sont susceptibles de témoigner de la véracité de ces dires.

- Vous seriez surpris de ce que peut dire un étudiant, Monsieur McCormack, répliqua Vinnie avec un clin d'œil.

Il est vrai que je ne suis pas la fille la plus populaire de Hearst. Je ferais peut-être donc bien de m'inquiéter de ce que les étudiants trouveront à dire sur moi. Les rumeurs et les ouï-dire, je connais. Et ils ont rarement été élogieux à mon sujet.

- Mais vous connaissant, vous n'oublierez certainement pas de rappeler à ces étudiants en question que le faux témoignage est passible de poursuites.

- Evidemment! assura Van Lowe, les sourcils froncés et la main sur le cœur.

Veronica secoua la tête face au spectacle que les deux hommes jouaient devant elle. Navrant d'hypocrisie.

- Vous conclurez donc comme moi que Mademoiselle Mars ne peut être tenue comme unique suspecte dans cette affaire et que sa détention est grandement discutable.

- La caution s'élève à 25.000 dollars. Si "votre cliente" veut voir la lumière du jour, elle n'a plus qu'à faire un chèque, les nargua Vinnie sans se départir de son sourire.

Le shérif lança enfin à la cantonade avant de faire une nouvelle sortie de scène:
- J'espère que tu as fait des économies, Veronica!

***


Assise sur le sol bétonné de sa cellule, Veronica faisait face au mur gris qui l'encerclait. Concentrée sur ce qu'elle entreprenait depuis quelques minutes maintenant, elle n'entendit pas les bruits de pas de son visiteur.

- Hey Gueule d'Ange! Tu as fini par choisir? Fitz ou Percy ?

Un sourire ravi illumina le visage de la jeune fille lorsqu'elle le tourna vers Weevil. Elle se redressa alors et s'avança vers lui.  

- Tu sais, V, que c'est généralement le nombre de jours passés en taule qu'on grave sur les murs? Toi, ça ne fait pas encore vingt-quatre heures!

- Je laissais les coordonnées de Cliff pour les prochains détenus.  

- Il est commis d'office!
lui rappela Weevil. Il n'a pas besoin de pub.

- Disons alors que je rends service au monde carcéral…. Et que j'en profite pour contrarier le shérif!


Weevil rit et, à travers les barreaux, lui tendit son poing contre lequel elle choqua le sien.

- Je vois que tu as une chambre privée. Petite veinarde!

- Mais je me suis fait une amie.


De la tête, elle lui désigna Pamela qui agita aussitôt sensuellement ses ongles manucurés pour saluer le jeune homme.  

- Chouette compagnie, ironisa Weevil à demi-mot.

Redevenant sérieux, il sortit une enveloppe de la poche de sa veste à capuche et l'ouvrit devant elle.

- J'ai fait ce que tu voulais. J'ai réussi à en tirer un bon prix mais je persiste à dire que c'est une belle connerie!

- Tu aurais préféré que je devienne la meilleure amie de Pamela pour obtenir 20.000 dollars rapidement?


- Hé bien…réfléchit Weevil.

Veronica lui donna alors une tape sur l'épaule lorsqu'elle le vit hésiter.

- Je dis juste que vendre un SUV flambant neuf, ça fait mal au cœur, reprit Eli.

- Ce n'est qu'une voiture, se résigna-t-elle en haussant les épaules.

Il replia l'enveloppe.

- Je crois que ton avocat m'attend. On se revoit dans quelques minutes, conclut-il en lui lançant un clin d'œil avant de partir.

Mais avant qu'il ne passe la porte, elle l'interpella à nouveau:
- Hey Sucre! Merci pour le coup de main.  

Il lui répondit par un léger signe de la tête et poursuivit son chemin.

C'est généralement dans ce genre de situations qu'on voit qui sont ses vrais amis. Même si notre amitié n'a jamais été signée par le sang et les franches accolades, je sais que je peux compter sur lui. Et qui mieux que Weevil Navarro pouvait refourguer une voiture en quelques heures?


I Hate Everyone de Get Set Go

Lorsqu'on vint enfin déverrouiller la grille de sa cellule, il faisait déjà nuit sur Neptune. Après un geste d'adieu à sa voisine, Veronica traversa les couloirs du département du shérif pour rejoindre Cliff et Weevil au secrétariat. Vinnie l'y attendait pour signer les traditionnels papiers de sortie lui recommandant de ne pas quitter la ville ou le pays.

- Les excuses vous préférez les faire maintenant ou on fait encore durer un peu le suspense? demanda Veronica en levant un sourcil.

Vinnie sourit et, comme pour hypnotiser un serpent, plaça son majeur et son index droits devant ses yeux puis face à ceux de Veronica à plusieurs reprises.

- Je te surveille. Ne l'oublie pas!

- Ouhh,
feignit-elle de trembler.

Au même moment, Kenny sortit d'un bureau en compagnie de Sacks. Lorsque Veronica le reconnut, son sang ne fit qu'un tour.


Il y a soudain comme une odeur de charogne dans l'air. Dix contre un que cet enquiquineur n'est pas étranger au témoignage qui m'a coûté la maudite somme de 20.000 billets!

Tout en enfilant sa veste, elle le suivit du regard, le visage fermé. Après avoir serré la main de l'adjoint au shérif, Kenny prit le chemin de la sortie et croisa la mine assombrie de Veronica. Un petit sourire en coin, il porta deux doigts à son front et la salua sans même s'arrêter. La jeune fille serra les dents et respira profondément.  
Elle récupéra enfin ses effets personnels et sortit sans demander son reste. Dehors, l'importun avait déjà disparu.

***


Après une courte nuit passée dans son lit, le lendemain matin, Veronica se réveilla dans un appartement vide. Une note dans la cuisine la prévenait que ses colocataires avaient été convoquées par le shérif. Message concis qui en disait long sur l'ambiance actuelle. Profitant donc de cette accalmie, Veronica s'était préparée un petit déjeuner conséquent – la nourriture de la prison n'avait pas été sans lui rappeler celle de Neptune High – avant de se rendre à Mars Investigations.

Dans les locaux du département du shérif, les principaux acteurs de la fusillade de la veille étaient chacun installés dans une salle d'interrogatoire ou un bureau. Interrogés par un agent, ils répondaient aux différentes questions.

- Diriez-vous que les propos tenus par Veronica étaient emprunts d'agressivité?

- Vous voulez dire plus que d'habitude? demanda Dick avec un rictus. Sitôt qu'elle ouvre la bouche, des serpents quittent sont corps. Et quand il s'agit de Logan… c'est l'Arche Perdue à elle toute seule.

- Evidemment! répliqua Mac. Comment répondriez-vous à un type qui vous cherche depuis le début du week-end, vous?

                            ***

Puisqu'il lui était interdit de quitter Neptune, il lui fallait mener sa propre enquête depuis son bureau. Elle se connecta alors à PrivateEyez, son plus fidèle allié, et commença ses recherches. Il fallait bien débuter quelque part.

- Je savais que je te trouverais là, dit Weevil en passant la tête par la porte.

- Qu'est-ce qui t'amène? demanda Veronica en relevant la tête de son écran d'ordinateur.

- Je me disais qu'après ton séjour en prison, tu aurais peut-être besoin d'un volontaire pour… tu sais… te remettre en selle, s'amusa-t-il en haussant les sourcils pour lui signifier ainsi le double sens de ses propos, un sourire coquin aux lèvres.

- Mais comme tu me l'as justement souligné hier, je n'y suis restée qu'une journée. On ne perd pas la main aussi vite, si?

- C'est toi qui vois, lui assura-t-il en levant les mains.

Il rit et s'installa sur le fauteuil face au bureau de la jeune fille.

- Je te remercie de m'avoir aidée, hier. Je n'aurais jamais pu trouver autant d'argent aussi rapidement sans toi.

- Arrête, tu vas me faire pleurer.

Veronica sourit de la pudeur du jeune homme et n'en rajouta pas, partageant son malaise.

- En tous cas, reprit Weevil, tu peux compter sur moi si tu as besoin d’aide. J’imagine que pour toi l’enquête n’est pas terminée.

- Elle ne fait que commencer!

                              ***

Pendant ce temps, au département du shérif. L'interrogatoire se poursuivait. Dans des pièces séparées, chacun répondait aux mêmes questions.

- Avez-vous trouvé l'attitude de Veronica suspecte avant, pendant ou après le paint-ball?

- Cette nana est suspecte au quotidien! lança Dick. Il n'y a pas un seul truc qu'elle fasse normalement. Vous ne trouvez pas ça bizarre d'être détective privée à 20 ans? Je suis sûre que cette fille couve un dérèglement psychologique grave!

- Suspecte? Non, se contenta de dire Wallace.

- Vous savez, je ne connais Veronica que depuis quelques semaines, dit Maria. Je doute donc de pouvoir dire ce qui peut être normal ou non pour Veronica.

- Après le coup de feu, Veronica est restée pétrifiée. Est-ce que ça la rend suspecte? demanda Mac à Sacks.

- Avez-vous vu quelqu'un agir bizarrement dans les environs durant votre campement?

- Tous ceux qui avaient une arme dans les mains durant cette idiotie de paint-ball! A quoi ça rime de s'affronter comme si on était en guerre? Pourquoi se courir après et imiter ce que tout le monde redoute?

L'agent regarda Wallace surpris. Comprenant que le représentant des forces de l'ordre ne saisissait pas l'intérêt de son envolée lyrique, il balaya sa réponse d'un coup de main et en fit une nouvelle:
- Non.

- Comment va votre pied, Mademoiselle Lopez?

- Mieux merci.

- Est-ce vous qui avez tendu l'arme de remplacement à Veronica Mars durant le match?


- Oui…répondit-t-elle en tendant davantage l'oreille. Celui de Veronica s'était enrayé durant la partie. Elle est venue jusqu'à nous en courant et nous a demandé un nouveau fusil. Etant assise à côté du matériel, je lui ai tendu le premier que j'ai attrapé.

- Avait-il un signe particulier?

 - Oui! Une étiquette indiquant "chargé avec de vraies balles!!", répliqua Maria, effarée par la question.



   A Mars Investigations, Weevil s'apprétait à repartir quand il demanda, par curiosité:
- Tu sais ce qui a pu se passer?

Veronica cessa toute activité et respira à fond.

- Je n'en ai pas la moindre idée. Mais je sens qu'un truc louche dort là-dessous. Si je raisonne logiquement, il faut que je commence par le commencement. C'est-à-dire le lanceur. Et c'est Maria qui m'a donné l'arme.

Weevil fronça aussitôt les sourcils.

- Tu veux dire que… tu la soupçonnes d'avoir eu un rôle quelconque dans l'affaire?

- Je veux dire que c'est elle qui m'a tendu le lanceur et que, soyons honnêtes, nous ne la connaissons pas.


- V, je t'avais dit que t'aurais des ennuis! lui rappela Eli.

- Je te l'ai déjà dit plusieurs fois aussi. Est-ce que tu m'as écoutée à chaque fois pour autant?


Weevil sourit. Elle n'avait pas tort.
Veronica attrapa une pochette cartonnée et l'ouvrit pour feuilleter les papiers qu'elle contenait.

- Les infos sur elles se font rares. C'est bizarre. On dirait qu'une partie de son passé a été effacée. Il faut que j'en sache plus.

Weevil jeta un coup d'œil au dossier en lisant par-dessus son épaule.

- 1423 San Pascual Avenue? Veronica, c'est à la sortie de la ville et je te rappelle que tu n'as plus de caisse.

Veronica leva alors les yeux sur Weevil et lui lança un de ces regards dont elle a le secret.

- Tu vas vraiment me faire le coup à chaque fois que tu auras besoin d'un coup de main?

Veronica papillonna des cils et lui sourit.

- Tu sais que je comprends davantage l'anglais que le langage des signes? Ca serait tellement plus simple si tu le disais clairement pour une fois.

Il enfila alors sa veste en cuir et sortit ses clés de voiture.

- Tu te bouges! dit-il en claquant des doigts.

Veronica sourit et prit alors ses affaires.

***


Pendant ce temps, assis dans la salle d'attente du Neptune Hospital, Vinnie patientait. Les jambes croisées, il feuilletait un magazine, entouré de quelques patients parfois mal en point.

- Shérif Van Lowe? l'interrompit un médecin.

Vinnie referma sa lecture et se leva pour le rejoindre.

- Monsieur Echolls vient de se réveiller, continua l'homme en blouse blanche en lui indiquant le chemin à suivre. Il est encore un peu fatigué mais si vous faites vite, il pourra répondre à vos questions.

Après quelques pas dans un couloir blanc et lumineux, le docteur frappa quelques coups secs à la porte et laissa entrer Vinnie avant lui.

- Mr Echolls, le shérif aimerait vous poser quelques questions.

- Qui?
demanda Logan, perdu.

Le jeune homme était allongé sur un lit métallique, un bras en écharpe. Ses traits étaient tirés, il semblait visiblement très fatigué.
Vinnie tourna un regard inquiet vers le médecin. Logan Echolls avait-il subi des dommages dont il n'était pas au courant?
Devant l'air ahuri du shérif, un sourire en coin naquit doucement sur le visage de Logan. Lamb ou Van Lowe. C'était vraiment la même chose.
Malgré sa fatigue et son pitoyable état de santé, la tentation avait été trop forte.

- Très drôle, Mr Echolls!
dit Vinnie quand il comprit qu'il venait de se moquer de lui.
Le jeune homme haussa alors faiblement les épaules, content de lui.  Puis se ravisa lorsque la douleur de sa blessure se fit violemment ressentir. Il allait devoir perdre certaines habitudes dorénavant.

- Vous souvenez-vous de ce qui s'est passé hier?
demanda le shérif pour être sûr.

- Plutôt bien, oui, répondit Logan en tentant de se redresser dans son lit. Il faut dire que la douleur que je ressens dans l'épaule me le rappelle de manière assez permanente.

- Est-ce que vous avez remarqué quelque chose d'inhabituel dans le comportement de Veronica à ce moment-là?

A cette question, Logan fronça les sourcils. Qu'entendait-il par là?

- Je… Que voulez-vous dire?

- Est-ce que son attitude aurait pu laisser entendre que son acte était volontaire? Est-ce qu'elle vous a menacé?

- Attendez! Vous la soupçonnez de m'avoir délibérément blessé?
comprit-il enfin.

Il marqua une pause et réfléchit en se passant une main sur la tête. Depuis son réveil, il n'avait encore pas envisagé cette possibilité. Il n'imaginait même pas que l'affaire fut suivie par le shérif.

- On nous a rapporté qu'elle avait proféré des paroles assez dures à votre égard. Qu'elle avait fait montre de violence.

- On parle de Veronica, là. La fille qui dégaine le plus vite au monde. Même Lucky Luke fait grise mine à côté d'elle. Aussi loin que je me souvienne, notre relation n'a jamais été calme. Mais de là à insinuer qu'elle l'aurait fait exprès…


- Laissez-moi quand même vous rappeler que la balle qui vous a blessé n'était pas une balle de peinture …

- Je le sais, ça,
le coupa Logan. Mais je connais aussi Veronica. J'imagine qu'il y a une réponse logique à tout ça. Et je suis même sûr qu'elle est déjà en train de la chercher.  

Un silence s'abattit sur la chambre. Silence interrompu par l'entrée intempestive de Dick. Sans frapper, il pénétra dans la pièce et avança d'un pas rapide jusqu'à Logan sans prêter attention aux autres visiteurs.
Lorsque la veille on l'avait chassé des urgences pour qu'il rentre chez lui, il avait fait un crochet par le bureau des infirmières. Il avait alors fait du charme à l'une d'entre elles afin qu'on le prévienne dès lors que son meilleur ami se réveillerait.

- Tu nous as fait une de ces peurs, fillette!


Face à cette invasion, le shérif décida de se retirer.

- Si des informations vous revenaient, vous savez où me joindre. En attendant, merci de m'avoir accordé un peu de votre temps.

Accompagné par le médecin, Vinnie quitta la pièce.

- Comment tu te sens? demanda aussitôt Dick.

- En pleine forme, mentit Logan sans réellement essayer de le prouver.

- Quand je pense à cette…Dick serra les dents pour s'arrêter à temps. Cette fille a un problème!

- Tu sais pourquoi le shérif enquête? demanda Logan sans tenir compte des propos de son ami.

- Tu poses la question?? manqua de s'étouffer Dick.

- Je n'ai pas porté plainte, il n'y a pas mort d'homme…énuméra Logan. Alors oui, je pose la question.

- T'es vraiment bizarre comme gars,
avoua le surfeur. Tu passes à ça de la mort et tu te demandes pourquoi la police fait son boulot. D'après ce que j'ai entendu, Hearst a déposé une plainte contre La Reine des Glaces pour ne pas être tenu responsable.

Logan respira lentement puis s'empara de l'interrupteur rouge pour appeler une infirmière. La douleur commençait à se réveiller. Il lui fallait la calmer.

***


A quelques kilomètres de là, Weevil venait de couper le moteur. Garés en face d'une petite maison toute simple, Veronica et lui descendirent de la voiture et traversèrent la rue.

- Tu me laisses faire, le prévint la détective.

- Bien Miss Marple!

Tous deux devant la porte d'entrée, Veronica toqua. Après quelques secondes d'attente, elle leva à nouveau le poing, prête à frapper encore, quand Weevil l'en empêcha. La porte s'ouvrit alors sur une femme portant l'uniforme du fast food du coin. Pourtant plutôt jeune, son teint terne la vieillissait extrêmement.

- Bonjour, je peux vous aider?
demanda-t-elle intriguée.

- Bonjour Madame Lopez, se lança Veronica. Excusez-nous de vous déranger, mais mon ami et moi aurions aimé vous parler. Je suis Betty, et voici Paquito…

Weevil salua la dame de la tête puis leva discrètement les yeux au ciel. Comment Veronica pouvait–elle garder son sérieux?

- … nous sommes des amis de Maria, continua la jeune fille. Et nous nous inquiétions de ne plus la voir depuis quelques temps.

- Oh, Betty et Paquito, bien sûr! Maria m'a beaucoup parlé de vous. Entrez donc.

Mince alors! Sacrée coïncidence tout de même.

Tout en passant la porte derrière madame Lopez, Veronica jeta un regard étonné à Weevil qui lui adressa un œil noir.

Il n'a visiblement pas apprécié le rôle que je lui ai attribué.

- Asseyez-vous. Je vais vous faire du café.

Lancés dans le jeu de l'investigation, Veronica et Weevil s'inventèrent un passé commun avec Maria et questionnèrent la mère de celle-ci. Ils découvrirent alors que madame Lopez ne discutait en réalité que très peu avec sa fille.

Pas étonnant donc que Betty et Paquito ne l'aient pas interpellée.

- Depuis que son frère nous a quittées, ma fille et moi sommes devenues un peu étrangères, vous comprenez?

- Je suis désolée pour votre fils. Maria ne m'en avait jamais parlé. Il y a longtemps qu'il est décédé?

- Oh non, ne vous méprenez pas. Il n'est pas mort. Disons simplement qu'il n'a pas suivi la même voie que nous.

Weevil, qui était resté en retrait jusqu'à présent, réagit enfin.

- Dans quelle prison se trouve-t-il? demanda-t-il avec tact après avoir déchiffré la gêne de la femme.

Madame Lopez redressa la tête de sa tasse de café et lui sourit péniblement.

- Los Angeles, murmura-t-elle.

   La discussion s'était révélée très intéressante pour Veronica. Elle avait désormais la certitude que quelque chose clochait chez sa colocataire. Après avoir conclu la discussion avec la mère de Maria, qui se trouva rassurée de savoir que sa fille avait des amis fiables, Weevil et Veronica prirent congé et regagnèrent leur voiture.  

- Paquito ??  demanda Weevil en posant ses deux coudes sur le toit de la voiture.

- Tu crois vraiment que Weevil aurait fait plus sérieux ? rit Veronica en ouvrant la portière du côté passager.

- Non mais un nom qui m’aurait un peu moins fait ressembler à un mariachi aurait tout aussi bien pu faire l’affaire.

- Qu’est-ce que tu as contre les mariachis ? demanda-t-elle simplement en haussant les épaules.

Weevil secoua la tête et soupira avant de finalement s’installer derrière le volant, imité par la jeune fille.

- Où est-ce que ça nous mène alors? demanda Weevil avant de mettre le contact.

- Tout droit à Los Angeles. Il faut que j'en apprenne plus sur Maria. Savoir ce qui s'est passé là bas pour qu'elle et sa mère emménagent à Neptune en laissant le fils prodigue derrière elles. Savoir aussi ce qui a poussé Maria à tellement changer pour qu'elle ne se confie plus à sa mère comme avant.

- Et ce, bien sûr, pour le bien de l'enquête, la taquina-t-il.

- Evidemment!

- Rien à voir avec ta curiosité naturelle!

- Absolument.

- Quelle mauvaise foi…

- Je te ferais remarquer que je suis accusée de tentative d'homicide. Et que Maria est ma seule piste pour le moment.


- Si ça peut te permettre de croire à ce que tu dis, rit-il.

Veronica le regarda en silence et conclut:
- J'ai horreur quand tu me tiens tête.

Weevil eut un rictus et démarra enfin.


  Après avoir traversé la ville en sens inverse, Weevil s'arrêta au pied de Mars Investigation. Weevil laissa tourner le moteur et attendit qu'elle descende du véhicule. Dans l'incompréhension la plus totale, Veronica le dévisagea.

- Quoi? Tu veux que je fasse le tour de la voiture pour t'ouvrir la portière? s'enquit Weevil.

- Bien que ça me touche que tu y aies ne serait-ce que pensé, je m'inquiète plutôt pour ton sens de l'orientation. Los Angeles se trouve un tout petit peu plus loin au sud.

- Pas question que tu y mettes les pieds. Souviens-toi, Van Lowe te surveille, dit-il en imitant le geste du shérif.

- Weevil, on parle de Vinnie!

- Veronica, c'est sérieux cette fois-ci. Tu es leur principal suspect pour le moment. Tu as déjà de la chance de ne pas te coltiner un bracelet électronique à la cheville, alors à ta place, je ne tenterais pas le diable!

- Et je fais comment? J'envoie Back Up enquêter à ma place?

- Ne te fais pas prier. J'ai déjà bossé pour ton père…


- Deux jours! lui rappela-t-elle en riant.

Eli se contenta de se taire et la regarda patiemment. Elle détourna le regard quelques secondes pour regarder dehors puis revint poser ses yeux sur lui.

- Tu gardes tes poings dans tes poches cette fois!! le somma-t-elle.

Weevil sourit devant l'abdication de la blondinette.

- Maintenant sors! lui ordonna-t-il. J'ai du boulot.

Veronica défit sa ceinture et s'exécuta, un sourire en coin sur les lèvres. Sur le trottoir, elle regarda la voiture et son conducteur s'éloigner, reconnaissante.

***


Dans la cité des Anges, une petite heure plus tard, Weevil sortait encore une fois de sa voiture. Levant la tête, il observa en silence un immense mur de béton grillagé, les mains fourrées dans les poches de sa veste. Après un instant de réflexion, il respira à fond pour se donner du courage et traversa la rue.

A Neptune, assise sur la canapé qui résidait dans l'entrée de Mars Investigations, Veronica tapa le numéro du portable de son père. Elle n'avait pas eu de nouvelles depuis qu'elle l'avait appelé du bureau du shérif. Mais encore une fois, elle tomba sur son répondeur. Elle ne lui annoncerait pas aujourd'hui qu'elle était sortie. Elle raccrocha alors et soupira.

Pourquoi faut-il toujours que les gens vous laissent tous tomber au même moment?

Elle laissa tomber sa tête contre le dossier du sofa et fixa le plafond. Les vitraux laissaient passer une lumière colorée. Veronica réfléchit un moment en silence. Enfin du silence!
Lorsque son esprit finit de tergiverser, elle se décida à composer un autre numéro de téléphone. Elle porta l'appareil à son oreille puis raccrocha aussitôt. Se mordillant la lèvre inférieure, elle réfléchit à nouveau.

Tu es une grande fille, Veronica. Raccrocher avant d'entendre la voix de ton interlocuteur n'est plus de ton âge. Du courage, allez!

Elle appuya alors sur la touche bis et se résolut à tenir bon.

Plusieurs heures avaient passé lorsque Weevil revint en ville. Après avoir gambadé dans le tout Los Angeles à la recherche du passé de Maria, le jeune homme semblait éreinté. Alors que Veronica était à son bureau, il s'affala bruyamment sur le canapé.

- Femme! Apporte-moi mes pantoufles!

En entendant ce vacarme, la détective sortit de son travail et se rendit dans l'entrée.  

- Le grand retour de Fred Flinstone !

Veronica se dirigea à la cuisine, ouvrit le frigo et revint avec une petite bouteille d'eau qu'elle lui lança.
Appuyée contre le chambranle, les bras croisés, elle le regarda se redresser pour s'asseoir convenablement. Il ouvrit la bouteille et en but une bonne partie. Après un silence.

- Je crois que tu fais fausse route sur Maria, dit-il calmement après un court instant de silence.

- Tu n'as rien trouvé? s'intéressa Veronica avant d'aller s'asseoir sur une chaise face à lui.  

- Si. Mais je ne crois pas que ça ait un quelconque rapport avec ton affaire. Si Maria est si mystérieuse sur son passé, c'est parce qu'il n'est pas réjouissant. Son frère Juan est à la prison du comté. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que ce n'est pas un type fréquentable. Il y a quelques années, la mère de Maria a voulu quitter L.A pour empêcher son fils de tomber dans le fléau des gangs. Mais avant qu'elle ait pu organiser leur déménagement, il s'est embarqué dans celui des Crips. *(un des gangs les plus dangereux de LA). Il a buté un gars et a fini en prison. Maria et sa mère ont fait leurs bagages pour se reconstruire une vie ailleurs.

- Tu as découvert tout ça comment?

- Tu ne tiens pas à le savoir, lui assura-t-il la mine sérieuse.

- Je sentais bien que quelque chose clochait chez elle,
dit alors Veronica pour éluder sa précédente question.

- Ne juge pas, V. On a chacun des choses à cacher.

Qui? Moi? Quelle partie de mon passé pourrais-je bien vouloir occulter? 

- Retour au point de départ si je comprends bien alors, marmonna Veronica en se laissant choir contre le dossier de la chaise.


Rester sur un échec n'était pas pensable pour Veronica. Si Maria n'était pas responsable de l'échange des balles alors il fallait poursuivre le travail. Elle se leva donc avec énergie et attrapa son sac.

- Un petit tour en forêt, ça te dit?

- Désolée cariña, mais mon offre tenait jusqu'à ce que je sois épuisé. Maintenant tu serais déçue, dit-il en étirant ses bras au-dessus de sa tête.

- Je te croyais téméraire,
le taquina-t-elle. C'est pas grave, donne-moi les clés de ta voiture, je m'offrirai un petit plaisir solitaire.

      Quelques minutes plus tard, Weevil conduisait la mâchoire serrée tandis que Veronica savourait sa victoire. De retour au Santa Monica Mountain National Recreation Area, cette dernière descendit de voiture et observa les alentours. Dès lors qu'elle eut posé le pied par terre, une boule naquit au creux de son ventre. A quelques mètres, il lui semblait voir une tâche de sang. D'un pas incertain, elle s'approcha de l'endroit où la foule avait formé un cercle. Recouvert par une fine couche de poussière, le rouge s'était obscurci en séchant.

- La scène du crime?
demanda Weevil en regardant la même chose.

Veronica respira profondément et changea de sujet.

- On est sur le terrain de paint ball. Là-bas,
expliqua-t-elle en désignant sa droite, c'était le stand, l'endroit où les organisateurs ont préparé les lanceurs.

- Est-ce que les types qui ont préparé la rencontre n'ont pas pu se tromper?

- J'imagine que tout est possible. Mais comment serait-ce arrivé?


Weevil et Veronica firent quelques pas jusqu'au stand en question et observèrent les environs. Tout avait déjà été retiré. Les panneaux, les filets. Il ne restait que les planches de bois qui servaient d'étais. Mais la jeune fille se souvenait de tout. Dans sa tête, chaque élément reprenait sa place.
Un peu plus loin, un ensemble de pancartes fléchées indiquait des directions. Weevil s'en était approché. Il fit signe à Veronica.

- Il y a un autre stand de tir dans cette direction. Ca vaut le coup d'aller voir, tu ne crois pas?

- Je croyais que tu étais fatigué,
lança-t-elle en rigolant tandis qu'elle le doublait.

Jouer sur les mots avec Weevil était facile. C'était même devenu une habitude.
Lorsqu'elle fut assez près pour lire les inscrïptions qui ornaient le stand, permanent celui-ci, Veronica s'arrêta et sourit. Weevil, qui traînait, la rejoignit alors.

- Un problème?
demanda-t-il.

- Une solution!

***


De retour en ville, Veronica ne perdit pas de temps et se rendit aussitôt au bureau du shérif.

Lorsqu'elle pénétra dans le bâtiment, elle remarqua aussitôt Maria, assise à une table face à un agent. Son air trahissait son agacement et sa fatigue. Après un regard circonspect, Veronica comprit qu'elle était la seule des témoins à être encore interrogée.

D'une certaine façon, cela l'arrangeait. Elle ne tenait pas spécialement à se trouver face à Dick tout de suite. Même si ce qui s'était passé la veille était encore un peu flou, de brèves images successives lui revenaient parfois en mémoire. Et celles de Dick à ce moment-là n'étaient pas des plus agréables. Même sans le son.

Il était temps de libérer Maria.

La détective se dirigea directement vers le bureau du shérif et le trouva à son bureau.

- Veronica Mars, chantonna-t-il en croisant ses mains sur le sommet de sa tête. Tu viens te livrer à la police?

- Je viens vous faire gagner du temps, comme d'habitude,
rectifia-t-elle.

- Ca tombe bien, ce soir je suis pressé.

- Commencez déjà par relâcher Maria,
dit la jeune fille en s'installa sur le fauteuil qui se trouvait face au bureau de Vinnie.

- D'accord!

Vinnie s'empara aussitôt du combiné du téléphone, près à appeler un de ses adjoints et interrompit son geste:

- Oh mais c'est vrai, rappelle-moi pourquoi je devrais faire ça?

- Maria n'est coupable d'aucun crime. Le responsable de l'échange des balles n'était pas parmi les étudiants. Il s'agit en fait sûrement d'une erreur humaine. Mais ça, ce sera à vous de le décider.

Il raccrocha.

- Petit Padawan va-t-il expliquer à Maître Jedi où il veut en venir? s'impatienta Van Lowe.

- Quelques mètres derrière le terrain aménagé pour la dernière partie de la compétition se trouve un stand de tir permanent. "Speedball", qui en est le gérant à l'année, était également l'organisateur de la session de paint-ball. Il devient alors facile de croire qu'une boîte de chevrotines se soit glissée au milieu des balles de peinture et qu'un technicien se soit alors trompé dans le remplissage des lanceurs.

- Tu vois quand tu veux!
lâcha-t-il quand elle eut fini son discours.

Perplexe, elle le dévisagea sans comprendre.

- Ce que je vois, c'est que je vais devoir me refaire un brushing à cause des heures passées dans ton cagibi humide, que je vais devoir apprendre à faire du vélo et que j'ai encore une fois dû faire le boulot de la police!

- Oui mais je t'ai laissé assez de temps pour faire tout ça,
sourit-il en se levant et en regagnant la porte de son bureau. Maintenant excuse-moi mais j'ai un innocent à libérer.
Sur ce, il quitta la pièce, laissant Veronica dans l'expectative.

Du temps? … J'ai la désagréable sensation de ne pas saisir la réelle signification de ces derniers mots. Vinnie m'aurait-il laissée sortir dans un but bien précis? Cela restera sans doute un mystère...

Après s'être résignée à ne pas chercher à comprendre le sens profond des mots de Vinnie, Veronica se rendit dans le hall du bâtiment. Maria venait juste d'être prévenue qu'elle était libre.

- Vous pouvez être sûrs que demain je commence des études de Droit! pesta-t-elle en enfilant sa veste.

Elle arracha ensuite son sac et ses clés des mains de l'officier et prit la direction de la sortie, les poings serrés.
Sous le porche, en haut des quelques marches qui les séparaient du parking, Veronica l'attendait.  

- Je te raccompagne?
demanda cette dernière avec un sourire timide.

Maria hocha sensiblement la tête et elles se mirent en route côte à côte en silence.

***


Hard To Live In The City, Albert Hammond Jr.

Un peu plus tard, assise sur le bord de la falaise, accoudée à la rambarde de sécurité, Veronica observait le soleil ardent embraser l’océan Pacifique. La brise automnale s’engouffrait dans ses cheveux détachés et rosait ses joues délicates. Pourquoi avait-elle ressenti le besoin de revenir ici, deux ans plus tard ? Elle se posait la question… Sans doute parce que ce qu’elle venait de vivre n’était pas sans lui rappeler la disparition de ses camarades de lycée quelques années plus tôt…
Une fois encore, toutes les circonstances l’avaient désignée comme coupable. Et une fois encore, elle avait prouvé qu’elle ne l’était pas…
Mais cette fois-ci, pas de machination machiavélique… Un simple accident qui aurait pu tourner au cauchemar. Que serait-il arrivé si Dick n’avait pas surgi ?
Mieux valait ne pas y songer…

Veronica poussa un soupir. Elle posa le menton sur sa main et contempla l’océan engloutir le soleil qui avait eu l’audace de le brûler quelques minutes plus tôt…
Sa vie serait-elle toujours ainsi ? Prouver son innocence lorsque tout l’accusait… Pourquoi cela ne lui arrivait-il qu’à elle ?
Elle plissa les yeux. Non, cela ne lui arrivait pas qu’à elle… Elle connaissait quelqu’un d’autre qui se battait actuellement pour faire triompher une vérité que tous refusaient… Shona. La sœur d’Hamilton… Elle ne savait pas exactement pourquoi, mais elle n’arrivait pas à sortir cette affaire de son esprit. Peut-être parce qu’elle n’avait pas eu l’occasion d’aller jusqu’au bout, de découvrir ce qui avait fait culpabiliser Hamilton au point de se droguer… Au point de mourir… Ou alors, peut-être était-ce parce que Shona lui rappelait son combat en la mémoire de Lilly… Cette tranche de vie où elle et son père étaient les seuls à contredire l’enquête officielle, mus par un pressentiment tenace…

Une flamme embrasa le regard de Veronica. Elle se leva et, tout en sortant un trousseau de clés de sa poche, s’approcha d’une voiture. Une Mustang cabriolet noire…

Bye bye SUV, bonjour Mustang ! C’est incroyable, même ma nouvelle voiture me replonge dans le passé… Weevil, le roi des bonnes occaz… Même si je ne tiens pas vraiment à savoir comment il a réussi à me trouver un tel bolide pour une somme si dérisoire…

Veronica entra dans la voiture. Même les effluves de cuir vieilli lui rappelaient l’odeur de sa LeBaron… Elle se saisit de son portable et composa un numéro. Elle tomba aussitôt sur un répondeur et laissa un message.

« Bonjour Shona, c’est Veronica. Ecoute j’ai bien réfléchi… Je ne suis pas débordée en ce moment et je me propose de poursuivre mon enquête sur Hamilton. Gratuitement, je veux dire… Ne me remercie pas, j’ai mes raisons. Contacte-moi si tu as de nouveaux éléments… A bientôt »

Elle raccrocha. Son regard se perdit dans le lointain. A l’horizon, l’océan finissait d’avaler le soleil. Le visage de Veronica se fendit en un sourire conquérant.



Pendant ce temps, à travers le flux de piétons, un homme aux cheveux châtains, dissimulé derrière un chapeau et des lunettes de soleil, s’avança devant un immeuble de haut standing. Il marqua un temps d’arrêt devant sa façade puis scruta quelques instants l’adresse inscrite sur le papier qu’il tenait discrètement au creux de sa main. Après avoir pris une inspiration, il s’avança à travers les portes tournantes, salua le gardien et d’un pas de plus en plus décidé, il atteignit les ascenseurs .

Au même moment en sortit un bruyant homme blond qui enlaçait une ravissante femme brune. Ils se bousculèrent et se dévisagèrent un court instant avant que le jeune blondinet ne remette sa mèche de cheveux en place. En haussant les yeux au ciel, il tourna les talons sans un mot et se dirigea vers la sortie, la main glissant lentement sur les fesses de sa compagne.

- Dick, voyons ! gloussa la jeune femme en lui tapant la main.

Comme à son habitude, l’employé acquiesça de la tête en souriant. Du coin de l’œil, l’inconnu observa la scène puis s’engouffra dans l’ascenseur.

D’un geste nerveux, il réajusta le col de sa chemise sous sa veste, ôta chapeau et lunettes et regarda satisfait son reflet dans le miroir devant lui. Enfin les portes s’ouvrirent et l’homme s’avança dans le couloir à la recherche de la bonne entrée.
Il  cogna trois fois fermement à la porte du fond. Après un court instant, celle-ci s’ouvrit péniblement. Le torse semi-bandé et l’épaule immobilisée, les trais tirés, Logan apparut grimaçant de douleur sous l’effort fourni. Il stoppa cependant net son geste en reconnaissant son visiteur.

Sous l’effet de la surprise, Logan le dévisagea sans pouvoir articuler un mot. Puis, progressivement l’expression de douleur s’effaça de son visage pâle et un demi-sourire naquit sur ses lèvres.

- Entre.

Episode écrit par Vertigo


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Ecrit par Spydinette 
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choup37, 18.04.2024 à 08:49

5 participants prennent part actuellement à la chasse aux gobelins sur doctor who, y aura-t-il un sixième?

chrismaz66, 18.04.2024 à 11:04

Choup tu as 3 joueurs de plus que moi!! Kaamelott est en animation, 3 jeux, venez tenter le coup, c'est gratis! Bonne journée ^^

choup37, 19.04.2024 à 19:45

Maintenant j'en ai plus que deux, je joue aussi sur kaa

Viens chatter !